mardi 7 juin 2011

Yelle, le blog de tournée : à la conquête de l'ouest US ‎

On croit d'abord entendre Pierre et le loup colorisé par les studios Disney, ou Poulenc en goguette chez Monsieur Hulot. Aux premiers coups des maillets sur le xylophone, on sait qu'il faudra en baver pour s'ôter des neurones le thème central intrépide de Quadrille : un décapage cervical au Karcher, une cure de G. Squad, l'intégrale de Magma, rien ne pourra l'y déloger. Mais là où la plupart des compositeurs de BO auraient estimé leur mission accomplie, Bertrand Burgalat ­ qui réalise ici son premier score, un score sans appel pour le reste de la production française reléguée en bas de tableau ­ ne succombe pas à la paresse des déclinaisons. Entièrement orchestrée par Burgalat lui-même pour un ensemble de vingt-huit musiciens dirigé par David Whitaker ­ l'homme de Londres de Gainsbourg ­, enregistrée dans les lambris d'Abbey Road, cette partition grand format réanime les merveilles oubliées d'un certain âge d'or de la musique au cinéma : Morricone pour les clavecins entêtants, Mancini pour les ballets miniatures, Rota pour les gimmicks pétillants. On pourrait comme ça continuer le jeu des ressemblances ­ de Roubaix, Loussier ­, on n'y trouverait que du beau linge. Mais ce serait réducteur de ne prêter à Burgalat qu'un talent récitatif, la prouesse majeure consistant justement à avoir su doser au gramme près les influences sans jamais céder au maniérisme, au plagiat bien fichu, grâce notamment à l'originalité des thèmes. Ici, c'est le Burgalat compositeur qui fait la différence : celui qu'on a hâtivement catalogué parmi les amuse-gueules easy-listening se révèle plus roublard et singulier qu'un vulgaire ambianceur de parties fines, avec dans son chapeau toute une gamme mélodique dont il aurait pu nourrir deux douzaines de BO ordinaires. A cette dépense sans compter de hautbois, de violons, de harpe, de flûtes et de trompettes, Burgalat a même ajouté quelque menue monnaie un peu trébuchante avec deux chansons interprétées lascivement par Miss Lemercier, une poignée de bricolages maison ­ avec synthés garantis pur Tricatel ­ et, surtout, une Leçon de solfège époustouflante qui perfore à coups de glissandi lugubres la belle insouciance de l'ensemble. Et tout ça se termine bien par un Quarapicho qui sera à coup sûr tube de l'été. Au Japon.

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